jueves, 9 de diciembre de 2010

De la fierté Latino

Alors que l’année 2010 s’achève, le sentiment que l’on retient en quittant l’Amérique latine est celui d’avoir exploré un continent en pleine redécouverte de lui-même. Un continent qui (re)prend peu à peu conscience de ses richesses et travaille à renforcer une auto-estime bien malmenée jusqu’alors.

Animal politique étrange et peu crédible pour les Européens, le “socialisme latino-américain du XXIème siècle” est ni plus ni moins diabolisé par les Etats-Unis. Au-delà des partis-pris politiques, le constat qui s’impose à celui qui prend le temps d’analyser ce processus de mutation, est bien celui d’un continent qui renaît lentement mais sûrement de ses cendres.

Depuis sa “découverte” en 1492, l’Amérique latine a alimenté le développement européen dans un premier temps, nord-américain par la suite. À en croire les nombreuses places et avenues qui portent son nom, les Latinos ne semblent pas porter rancoeur à ce cher Cristobal. Il n’en reste pas moins que l’argent de Potosí, l’or brésilien de Minas Gerais, le café colombien et le sucre cubain, promesses éphémères de richesse, ont paradoxalement ruiné le continent. Eduardo Galeano, explique ainsi la divergence de destins entre l’Amérique du Nord et sa soeur du Sud: «Au Nord de l’Amérique il n’y avait ni or ni argent, il n’y avait pas de civilisations indigènes avec de fortes concentrations de population déjà organisée pour le travail, il n’y avait pas non plus de sols tropicaux incroyablement fertiles sur la frange côtière que colonisèrent les Anglais.»[1]







La donne a changé, n’en déplaise aux investisseurs étrangers et aux agences de notation. Au cours de l’année écoulée, ce ne sont pas moins de 5 groupes pétroliers étrangers qui ont dû plier bagages et quitter l’Equateur. Trop longtemps les ressources naturelles ont été bradées à des multinationales par les gouvernements et les oligarchies complices de l’expropriation. Trop longtemps les Latinoaméricains se sont convaincus que leurs ressources seraient mieux gérées par des investisseurs étrangers. Au moment où, ironie de l’histoire, l’Espagne connaît le taux de chômage le plus important de son histoire, l’Amérique latine a décidé de prendre son destin en main.

Les idées de souveraineté, de dignité et de fierté nationale reviennent très souvent dans le discours des dirigeants latinos actuels. Plus qu’un fond de commerce politique, il s’agit bien là des fondements de la nouvelle intégration latino-américaine.

L’heure est en effet à la valorisation de la diversité naturelle et démographique du continent. La Constitution de l’Etat Plurinational de Bolivie, ratifiée en 2009, ne reconnaît pas moins de 36 langues officielles. Il semble bien loin le temps où mastiquer la coca était un acte criminel et où la DEA (Drug Enforcement Administration) étatsunienne faisait la loi sur le sol bolivien. La Whipala a bel et bien retrouvé de ses couleurs, à l’image du patchwork ethnique que constitue la population bolivienne. Plus au Nord, l’Equateur célèbrait lui aussi en novembre, à l’occasion de son recensement national, la diversité des visages qui le composent à travers le slogan “Identifícate, orgullosamente indígena”.







Las venas abiertas de América Latina, Catálogos, 2003, p. 173